J’ai souvent des professeurs qui me demandent comment aider leurs élèves qui ont des difficultés à écrire. Comment remédier en classe à ce problème? La réponse que je leur fais est en premier lieu de questionner tous leurs élèves sur leurs ressentis concernant le geste d’écrire. C’est important selon moi de prendre ce temps d’interrogation sur « comment je me sens quand j’écris ». Cette question simple n’est que très rarement posée à celui qui écrit. J’engage le professeur à également plancher sur la question, tout comme ses élèves, le processus n’en sera que plus riche lors de la discussion finale.
Les quelques questions à poser ont pour but de faire prendre conscience à l’élève de ses ressentis quand il effectue une tâche d’écriture, de faire émerger d’éventuelles douleurs jusque-là intériorisées. Je remarque en effet que beaucoup d’élèves qui viennent me voir ne sont au départ pas conscients d’avoir mal en écrivant, ni aux doigts, ni à la main, ni au bras. Beaucoup estiment qu’écrire fait souffrir et ceci est pour eux un principe de base. Que ce soit le fait d’une tenue de crayon ou/et d’une posture inappropriées, ils souffrent depuis qu’ils ont un crayon en main, à savoir des années sans que quelqu’un leur ait jamais demandé s’ils avaient mal ni expliqué qu’écrire ne doit pas faire souffrir physiquement!
Cette élève de 5ème à qui je demandais si elle avait mal en écrivant m’a répondu que non, pas souvent, seulement quand elle devait copier beaucoup de texte. J’ajoute qu’elle ne voyait pas trop pourquoi son père tenait tant à ce qu’elle me rencontre car pour elle son écriture ne lui posait pas de problèmes… Je lui propose de copier un petit texte de trois lignes et je la filme. Je constate combien ses doigts sont raides, leurs bouts sont rouges tant elle serre son crayon fort, son poignet est constamment sollicité. Au bout de la copie, elle jette le crayon sur la table et secoue la main d’un geste automatique… Revenir sur ces gestes non conscients en lui expliquant qu’ils sont le signe que son corps souffre en écrivant lui a permis d’entendre qu’il était préférable de réapprendre à tenir son crayon convenablement pour arrêter de souffrir inutilement. Sans cette démonstration, cette prise de conscience elle n’aurait jamais accepté d’entrer dans un réapprentissage.
Avec vos élèves, comment procéder concrètement?
1/ Prévoyez un temps de 45 minutes dans votre emploi du temps.
2/ Distribuez le petit questionnaire et suggérez aux élèves de développer leurs réponses s’ils le souhaitent.
3/ Proposez aux élèves un temps d’écriture spontanée de 3 minutes avec pour question de départ « comment je me sens quand j’écris ». L’écriture spontanée, chère à mon cœur car elle fait partie de mes outils de journal créatif, est une technique puissante et efficace qui permet d’accéder à des pensées profondes, des sensations, des impressions que nous ne laissons que rarement remonter à la surface.
La procédure: invitez les élèves à écrire sans interruption pendant 3 minutes (vous chronométrez) mais surtout en prenant leur temps, inutile d’écrire vite. Demandez-leur de laisser leur main courir sur le papier, sans se relire, sans raturer, sans faire attention à l’orthographe ou à la grammaire. Ils doivent écrire tout ce qui leur passe par la tête sur le sujet et s’ils n’ont plus rien à dire, qu’ils écrivent « je n’ai rien à dire, je bloque, c’est nul ! etc…jusqu’à la fin des 3 minutes!
Au bout de ce temps, observez discrètement ceux qui secouent la main, ceux qui se frottent les doigts, le poignet, ceux qui se massent l’épaule. C’est déjà un indice.
Demandez à chacun d’entourer 3 mots clés dans son texte et d’écrire une petite phrase de conclusion en les insérant. Proposer à ceux qui le souhaitent de partager leur phrase ou leur expérience suite à cet exercice.
4/ Reprendre le questionnaire en groupe classe et installer une discussion, laisser émerger les réponses, les avis.
5/ Pour conclure, vous pouvez expliquer qu’il est important de manifester ses difficultés d’écriture car elles peuvent impacter grandement la scolarité et que ceux qui sentent qu’ils auraient besoin d’aide dans ce domaine peuvent venir vous en parler. Le dialogue pourra s’instaurer autour de leurs réponses au questionnaire pour commencer.
Voici les questions simples qui me paraissent essentielles de poser à tout élève à partir du cycle 3 et jusqu’au lycée. La petite séance que j’ai déroulée sera bien sûr allégée pour les élèves les plus jeunes.
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